Gary Maavara, 2ème partie: Taille de l'industrie canadienne
Interviewed by Fil Fraser at Banff World Media Festival on Juin, 2011
Fraser. Pouvez-vous nous parler, d’après votre expérience, de la réglementation des films et de la télévision au Canada ?
Maavara. Toute personne ayant voyagé à l’extérieur du Canada réalise l’abondance d’une programmation de qualité dans ce pays. En ce qui concerne la programmation télévisuelle locale, le Canada est l’un des pays les meilleurs au monde. Notre programmation en matière d’actualités et d’affaires publiques est toute aussi bonne qu’une autre. Notre production sportive est la meilleure sur terre : la raison pour laquelle je dis cela, c’est que l’équipe qui produit tous les Jeux Olympiques est canadienne. Une équipe mobile de canadiens n’a cessé de le faire depuis 1988. Côté documentaires, cela va sans dire : nous sommes excellents. Côté dramatiques, nous avons du mal, tout particulièrement à cause de la taille de l’audience.
F. Il y a toujours ceux qui disent que nous aurions dû aller plus loin en matière de réglementation, et tout particulièrement pour la télédiffusion, que nous devrions avoir quelque chose du même type que ce que Pierre Juneau a introduit pour la radio, c’est-à-dire 30% de contenu canadien. On peut invoquer un argument similaire pour le cinéma canadien, dans le sens où le public canadien devrait avoir un plus grand accès à ses longs métrages. En d’autres termes, nous aurions pu faire plus.
M. Je ne suis pas sûr d’être d’accord avec cela. Si vous mettez le contenu devant les gens, il n’est pas certain qu’ils le regarderont. On ne peut pas échapper au fait que nous sommes tout près des Etats Unis et que les gens y sont attentifs. Le débat dont vous parlez tourne autour des dramatiques et des émissions préparées à l’avance. Côté cinéma, si vous regardez les 25 dernières années, il n’y a pas eu beaucoup de grands films durables que vous voudriez sortir de l’étagère et regarder. Par contre, les films canadiens deviennent assez bons depuis quelque temps. Je pense qu’il a fallu tout ce temps pour développer un vivier de talents adéquat. Je ne veux pas en cela dénigrer les personnes qui étaient là avant. Mais elles agissaient avec peu de moyens, alors qu’on peut parler davantage à présent d’une industrie.
Arthur Weinthal disait qu’un film était plus un métier artisanal qu’un art en soi : vous pouvez avoir un scénario magnifique pour les acteurs, il vous faudra aussi cet élixir magique qui en fera une grande histoire. Nous commençons à faire cela plus souvent avec des films tels que Barney's Version, et nous y sommes très bons maintenant.
F. Nous avons du métier.
M. Oui. Sur Movie Central, par exemple, nous montrons tous ces films canadiens récents et les films en langue française; et nous avons de bonnes audiences.
F. Faites-vous commande de films ?
M. Oui. Nous en commandons beaucoup. Barney's Version n’existerait pas sans nous.
F. Quel est le budget que cela représente ?
M. Ce que nous dépensons ? Je ne vais pas le dire sur un enregistrement, mais nous dépensons pas mal. J’ai souligné récemment lors d’un sommet sur la radiodiffusion sonore et visuelle que l’un des mythes que nous avons au Canada est qu’il n’y a pas de marché pour le contenu canadien. J’ai fait une recherche sur cette enveloppe il y a quelques semaines, j’ai parcouru tous les rapports divers et compté toutes les dépenses faites sur du contenu canadien. Vous ne devinerez pas le total. Le total atteignait 10 milliards de dollars.
F. Annuels ?
M. Annuels.
F. Ouah ! La majeure partie étant de l’argent du gouvernement ?
M. En gros, je pense qu’environ 2 milliards de dollars viennent du gouvernement, si l’on prend le FMC (qui bien sûr n’est pas de l’argent du gouvernement), Téléfilm et CBC. Le reste est de l’argent privé. La remarque à faire ici est que si vous preniez une autre industrie telle que celle de la chaussure, vous pourriez penser que 10 milliards de dollars est un grand marché. On pourrait faire quelque chose avec un tel marché. Ainsi, si nous nous penchons sur le régime actuel, nous devrions nous demander ce que nous faisons d’un point de vue stratégique pour créer le contenu qui attirera les audiences au Canada et à travers le monde. Mais les objectifs en matière d’audience ne sont pas les seuls à prendre en considération. Ma critique du régime règlementaire est qu’il doit être plus stratégique. Il existe quantité de choix que nous devons faire afin d’encourager le développement d’un contenu réellement formidable.
Gary Maavara, 3ème partie: Intégration verticale et ré-imaginer les médias Industries